Matthieu Saglio, magnifique violoncelliste, accompagné par Emilio Garrido, sur un très beau poème d’Antonio Colinas "Conocéis el lugar ?", il y a quelques temps au Satellit café de Roanne.
Encore
un moment sublime, à écouter en silence...
Conocéis el lugar donde van a morir
Las arias de Händell ?
Creo que es aquí, en este espacio
Donde se inventa la infinitud de los amarillos;
Un espacio en el centro del centro de Castilla
En el que nuestros cuerpos
Podrían sanar para siempre
Si tus ojos y mis ojos
Mirasen estos páramos
Con piedad absoluta
Y en donde hasta el espíritu suele arrodillarse
Para hacernos su ofrenda
En rosales de sangre.
En este espacio hay un fuego blanco
En el que viene a expirar esa música
Que nos llega de tan lejos !
Conocéis el lugar donde van a morir
Las arias de Händell ?
Está aquí, en una tierra con más cielo que tierra,
Donde los ruiseñores serenan la alameda
Y la alameda serena a los ruiseñores,
Y con la emanación
Húmeda del tomillo más nocturno,
Acude un enjambre de estrellas
A venerar la última espina de Cristo.
Es el lugar donde la luz
Llora luz
Y la catedral de los cardos
Alza su grito de silencio,
Y están solas, muy solas, las vírgenes anunciadas,
Y el pueblo amurallado y muerto
Asciende vivo sobre un horizonte de lágrimas,
No sé si como un salmo
O como una corona de piedras inciertas.
Conocéis el lugar donde van a morir
Las arias de Händell ?
Está aquí, en el centro del centro de Castilla,
Donde por los linderos morados
Se tensa, como un arco, la luz;
Es un espacio en que la nada es todo
Y el todo es la nada,
Y en el que junio joven viene por los montes
Vertiendo de su copa oro líquido.
Es un lugar en el que el espacio y el tiempo
Sólo son una hoguera
Que arde y que mantiene su combustión
Gracias a nuestras vidas (quiero decir :
Gracias a nuestras muertes).
La música que más amáis
Aquí tiene su tumba.
Es la música que, a través de la respiración de las espigas,
Viene a morir en la luz que respiran nuestros pechos.
Antonio Colinas
Desiertos de la luz
Photo de juanjominor
Connaissez-vous
l’endroit où vont mourir
Les
airs de Händell ?
Je
pense que c’est ici, dans cet espace
Où
a été inventé l’infinité des jaunes;
Un
espace dans le centre du centre de la Castille
Dans
lequel nos corps
Pourraient
guérir pour toujours
Si
tes yeux et mes yeux
Regardaient
ces étendues désertiques
Avec
une piété absolue
Et
où même l’esprit a l’habitude de s’agenouiller
Pour
nous offrir sa gerbe
De
rosiers de sang.
Dans
cet espace il y a un feu blanc
Dans
lequel vient expirer cette musique
Qui
nous arrive de si loin !
Connaissez-vous
l’endroit où vont mourir
Les
airs de Händell ?
C’est
ici, dans une terre avec plus de ciel que de terre,
Où
les rossignols apaisent l’allée de peupliers
Et
l’allée de peupliers apaise les rossignols,
Et
avec l’émanation
Humide
du thym au milieu de la nuit,
Arrive
un essaim d’étoiles
Pour
vénérer la dernière épine du Christ.
C’est
le lieu où la lumière
Pleure
la lumière
Et
la cathédrale de chardons
Elève
son cri de silence,
Et
elles sont seules, très seules, les vierges annoncées,
Et
le peuple entouré de murailles et mort
Se
relève vivant sur un horizon de larmes,
Je
ne sais si c’est comme un psaume
Ou
comme une couronne de pierres incertaines.
Connaissez-vous
l’endroit où vont mourir
Les
airs de Händell ?
C’est
ici, dans le centre du centre de la Castille,
Où
par les limites mauves
La
lumière est tendue comme un arc;
C’est
un espace où le néant est tout
Et
où le tout est néant,
Dans
lequel le jeune juin vient par les montagnes
Verser
sa coupe d’or liquide.
C’est
un endroit où l’espace et le temps
Sont
seulement un bûcher
Qui
brûle et qui maintient sa combustion
grâce
à nos vies (je veux dire :
grâce
à nos morts).
La
musique que vous aimez le plus
A
ici son tombeau
C’est
la musique qui, à travers la respiration des épis,
Vient
mourir dans la lumière que respirent nos cœurs.
Antonio Colinas
Déserts de la lumière